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Le pop art incarné
HOMMAGE A ANDY WARHOL
Figure
emblématique du pop art, Andy Warhol est décédé
il y a vingt ans au New York Hospital. Un musée éponyme
abrite depuis 1989 à Pittsburg, ville où il a grandi,
la plus importante collection de ses réalisations. Une oeuvre
et un personnage qui se confondent et se reflètent dans leur
caractère omniprésent et incontournable.
Deux oeuvres font vraisemblablement se rejoindre le centre
Pompidou musée
du Louvre. Ce sont deux portraits au sourire discret
et en réserve, portraits de femmes dont la bouche close ne
laisse pas échapper le son de la voix du sujet représenté.
On a pourtant beaucoup parlé d'elles. Pour l'une, des
scientifiques japonais ont récemment reproduit sa voix. Pour
l'autre, l'on dispose de ses films. Ces sont les 2 “Liz” : Liz
Taylor et Mona Lisa. Si la voix des femmes est un règne,
tel que pourrait l'entendre Pascal
Quignard alors Andy Warhol et Léonard de Vinci
pourraient bien être des rois devenus muets tant la popularité
de leurs oeuvres semble presque avoir assombri leur propre voix, leur
propre dessein artistique. Aux icônes qu'il a représentées,
Jackie
Kennedy, Marilyn
MonroeLiz
Tayloron a pu garder l'image d’Andy
Warhol à la perruque peroxydée. Image
microscopique. Il faut considérer ce propos, et pour bien le
comprendre évoquer le contexte de l'après-guerre dans
lequel va s'inscrire Warhol : “Si vous voulez tout savoir sur
Andy Warhol, il vous suffit de regarder la surface de mes peintures,
de mes films, de moi-même. Me voilà. Il n’y a rien
derrière.”
Le contexte de l'après-guerre
”Je
voudrais être une machine”, ”A l'avenir tout le
monde sera célèbre pendant quinze minutes”,
derrière les bons mots, ou les phrases colportables à
loisir, se cache un artiste de l'exigence. Au début des années
1960 jusqu'à la fin des années 1980, à partir
d'un scandale quasi permanent, Andy Warhol va faire sa révolution
artistique. En 1950 il propose sa première exposition à
New York, soit quinze dessins sur des textes de
Truman
Capote. Au cours de ces années, la société
américaine va connaître un changement progressif et
déterminant avec le rôle de l'industrialisation et du
développement de la culture de masse. Changement radical qui
va chez Warhol jusqu'à modifier un double rapport : celui à
l'oeuvre, et celui à l'artiste. Un artiste qui n'est plus
l'auteur de l'oeuvre de base mais qui va par l'intermédiaire
des moyens de reproduction en série la modifier pour la faire
sienne. Warhol explique ce mouvement : “Si je peins de cette
façon, c’est parce que je veux être une machine, et je
pense que tout ce que je fais comme une machine correspond à
ce que je veux faire.” C'est une situation de rupture qui
marque ces années de l'après-guerre.Perry
Anderson, dans 'Modernité et Révolution'
analyse bien cette mutation où “l'ancien ordre
semi-aristocratique ou agraire et ses corollaires ont disparu dans
tous les pays. La démocratie bourgeoise s'est universalisée.
Dès lors, certains liens décisifs avec un passé
précapitalisé se trouvaient rompus. En même
temps, le fordisme arrivait en force. La production en série
et la consommation de masse transformaient les économies de
l'Europe occidentale selon le modèle américain. On ne
pouvait plus hésiter un instant sur le type de société
que cette technologie allait renforcer : une civilisation
capitaliste uniformément industrielle et d'une stabilité
étouffante s'était installée.”
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