"L'obsolescence est seulement la preuve d'un manque d'imagination"

SAN FRANCISCO (Etats-Unis) (AFP), le 31-05-2002

Dans les locaux d'un ancien fabricant de crèmes glacées, dans un quartier abandonné livré aux gangs d'Oakland (Californie), James Burgett, ancien toxicomane, recycle des montagnes de matériel informatique pour aider à résoudre ce problème de plus en plus préoccupant pour l'environnement.

Cet ancien membre d'un gang de motards se trouve désormais à la tête d'une entreprise, baptisée Computer Ressource Center, qui répare ou détruit de vieux ordinateurs, des imprimantes et autres matériels informatiques.

C'est l'accumulation, sans cesse croissante, de rebuts informatiques, qui l'a convaincu de se lancer dans cette activité non lucrative.

Un collectif international d'organisations de défense de l'environnement avait estimé en février à San Francisco que la Chine, le Pakistan et l'Inde étaient en train de devenir la poubelle du monde en matière d'ordinateurs et autres rebuts informatiques toxiques.

Ces déchets, surnommés "e-déchets", augmentent au rythme de 18% par an, avait précisé le collectif regroupant notamment les organisations pakistanaise SCOPE, indienne Toxic Links, Greenpeace-Chine et la Coalition sur les polluants de la Silicon Valley, une association américaine.

Les fabricants d'ordinateurs commencent timidement à lancer des programmes de récupération, et certains Etats américains réfléchissent à l'instauration d'une taxe de recyclage sur les ventes de produits informatiques.

Mais James Burgett, 38 ans, 160 kilos et force tatouages, n'a pas le temps d'attendre.

Tous les mois, avec ses 40 employés (cinq salariés et 35 bénévoles), il trie quelque 200 tonnes de matériel informatique, pour en extraire les parties réutilisables. Les déchets sont ensuite reversés à des usines de recyclage.

James Burgett assure qu'aucune partie de ces rebuts n'atterrit dans des décharges ou n'est expédié à l'étranger. Son opération rapporte quelque 600.000 dollars par an en métal recyclé.

"Cela ne fait pas de nous des gens riches, mais on s'en sort, et en plus on fait quelque chose de positif", explique-t-il. La devise de l'entreprise: "L'obsolescence est seulement la preuve d'un manque d'imagination".

L'an dernier, l'entreprise a offert 5.000 ordinateurs réparés à des associations caritatives dans le monde, notamment en Thaïlande et en Inde, et a prévu d'en offrir quelque 12.000 cette année. Burgett est particulièrement fier que son opération se passe de Microsoft: il équipe tous ses ordinateurs réparés du système gratuit Linux. "Microsoft est partout, ça suffit", dit-il.

L'ancien motard avait commencé en 1994, en récupérant des matériaux pour nourrir sa dépendance à l'héroïne. Après un certain temps, à l'inverse, c'est le succès de l'opération qui l'a aidé à se débarrasser de la drogue.

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